Ce 2 mai 2025, nous commémorons les deux ans du martyr de Cheikh Khader Adnan, dirigeant emblématique du mouvement des prisonnier·es palestinien·nes, tombé le 86e jour de sa grève de la faim dans les prisons sionistes, volontairement privé de soins médicaux afin de garantir son exécution. Le martyr de Cheikh Khader Adnan doit être clairement compris comme un épisode central de la politique d’assassinats ciblés menée par l’occupation, une stratégie visant à réduire au silence et à effacer un symbole du peuple palestinien, du mouvement des prisonniers et de la résistance — lui qui, par sa dignité, sa force et son humanité, incarnait la victoire vivante sur son geôlier.
Marié à Randa Musa, père de neuf enfants (Maali, Beesan, Abdel-Rahman, Hamza, Mohammed, Ali, Maryam, Omar et Zainab), Khader Adnan était profondément aimé dans sa communauté d’Arraba, près de Jénine, et au sein de sa famille, où il représentait un modèle de tendresse et de chaleur humaine. Boulanger de métier, il tenait une épicerie-boulangerie à proximité de Qabatiya, dans la région de Jénine, et était porte-parole du Mouvement du Jihad Islamique Palestinien. Inlassable combattant de la liberté, il a arraché sa libération à quatre reprises grâce à ses grèves de la faim, insufflant une nouvelle dynamique révolutionnaire au mouvement des prisonnier·es. Présent dans chaque tente de solidarité aux grévistes de la faim, dans les funérailles de chaque martyr, auprès de chaque prisonnier libéré, Cheikh Khader Adnan était une présence constante. Chaque prisonnier·e, chaque famille de détenu·e savait pouvoir compter sur son soutien inébranlable. Il participait, dirigeait, et prenait la parole dans toutes les manifestations, grandes ou petites, en soutien au mouvement carcéral, pour exiger la libération, et pour dénoncer la « coordination sécuritaire » avec l’occupation menée par l’Autorité palestinienne — voix inflexible de la conscience et de la résistance.
Son martyr — ou plutôt son assassinat derrière les barreaux — a provoqué une réponse immédiate de la résistance à Gaza, suivie d’une série d’assassinats ciblant la direction du Mouvement du Jihad islamique. Durant la Bataille de la revanche des libres, en mai 2023, malgré les pertes douloureuses de plusieurs cadres tombés en martyr, la résistance a tenu bon à Gaza, infligeant de coups puissants à l’occupant, et renouvelant sa direction pour la prochaine phase de lutte — celle que nous vivons aujourd’hui à travers le Déluge d’Al-Aqsa et la résistance au génocide sioniste-impérialiste en cours.
Aujourd’hui, le corps du Cheikh Khader Adnan reste retenu par l’occupation, l’un des près de 700 corps de martyrs palestinien·nes détenu·es par l’ennemi, dont 75 sont des prisonniers — 64 d’entre eux sont tombés en martyrs depuis le lancement du Déluge d’Al-Aqsa. Son esprit demeure vivant dans l’élan de résistance qui continue de faire avancer le mouvement des prisonnier·es, malgré les tortures et les abus les plus extrêmes ; dans chaque acte de résistance né des villages, des camps de réfugié·es et des villes de Cisjordanie ; dans chaque marche, manifestation ou protestation affirmant que Gaza ne sera pas laissée seule ; et bien sûr, dans les rues, parmi les déplacé·es, et dans les tunnels de la résistance à Gaza, en lutte contre le génocide. Cheikh Khader Adnan vit dans chaque action menée à travers le monde, par les Palestinien·nes et les Arabes en exil ou en diaspora, et par le mouvement international anti-impérialiste, solidaire de la libération de la Palestine — chaque action qui dénonce et combat l’occupation et ses parrains impérialistes.
Khader Adnan et le mouvement des prisonnier·es palestinien·nes
Khader Adnan a été arrêté à 15 reprises au cours de sa vie — 12 fois par l’occupation et 3 fois par l’Autorité palestinienne, dans le cadre de sa collaboration sécuritaire avec le régime sioniste, connue sous le nom de « coordination sécuritaire ». Il a passé huit années dans les prisons de l’occupation. Né le 24 mars 1978 à Arraba, près de Jénine, en Cisjordanie occupée, il a poursuivi ses études à l’université de Birzeit après le lycée, où il s’est spécialisé en mathématiques et s’est engagé profondément dans le mouvement de libération palestinien. En tant qu’étudiant, il a rejoint le Mouvement du Jihad Islamique Palestinien en 1996, devenant porte-parole du mouvement et mobilisant ses camarades pour s’opposer prétendu « processus de paix d’Oslo » et lutter pour la libération de la Palestine.
La prisonnière libérée Mona Qa’adan se souvient :
« Khader possédait, dès ses débuts dans le JIP, une conscience aiguë — politique et culturelle — qui a renforcé son efficacité sur tous les terrains : d’abord à Arraba, puis à Birzeit, et dans bien d’autres villes encore. »
Il a été arrêté pour la première fois par l’occupation en 1999, et a passé quatre mois en détention administrative — c’est-à-dire sans inculpation ni procès, sur la base d’un « dossier secret » auquel ni lui ni son avocat n’avaient accès. Les ordres de détention administrative sont renouvelables indéfiniment, et les Palestinien·nes peuvent ainsi passer des années en détention, de manière arbitraire sans accusation formelle. Aujourd’hui, plus de 3 600 prisonnier·es politiques palestinien·nes — sur un total de plus de 10 000 — sont détenu·es sous ce régime, souvent utilisé pour cibler les leaders communautaires et les militant·es, notamment du mouvement étudiant, du mouvement des femmes, des comités de défense des terres et d’autres mouvements sociaux.
En février 2000, il est arrêté pour la première fois par l’Autorité Palestinienne, à la suite d’un événement devenu célèbre dans l’histoire du mouvement étudiant de Birzeit. À cette époque, Lionel Jospin, alors Premier ministre français, visitait Birzeit quelques jours après avoir condamné le Hezbollah et la résistance libanaise face à l’occupation sioniste du sud-Liban — quelques mois avant la libération totale du territoire libanais, le 25 mai 2000 — les qualifiant de « terroristes ». Khader Adnan fut le premier étudiant à se lever pour dénoncer Jospin, entraînant ses camarades à lui lancer chaussures et pierres, et à l’expulser de l’université.
C’est pendant cette détention par l’Autorité palestinienne qu’il entame sa première grève de la faim, qui durera 10 jours, pour exiger sa libération — une arme de lutte puissante contre les emprisonnements arbitraires, devenue une stratégie centrale dans l’histoire du mouvement des prisonniers palestiniens.
En 2002, au plus fort de l’Intifada d’Al-Aqsa, il est de nouveau arrêté par l’occupation, et détenu une année en détention administrative. Six mois à peine après sa libération en 2003, il est de nouveau enlevé, cette fois placé à l’isolement. Mohammed al-Qeeq, lui-même futur gréviste de la faim dans les prisons de l’occupation, témoigne : « J’ai rencontré Adnan lors de ma deuxième arrestation, en 2004, lorsque les soldats sionistes nous ont transférés en bus de la prison de Megiddo, au nord de la Palestine, jusqu’au désert du Naqab au sud. »
Les soldats insultaient les prisonniers dans le bus, et Adnan s’y opposa avec colère.
« À notre arrivée — après six heures d’épuisement sur des sièges en métal — il refusa de descendre du bus pour protester contre ce traitement. Ils finirent par le renvoyer à Megiddo. »

En 2005, il épouse Randa, sa compagne de lutte. Avant leur mariage, ils eurent une discussion décisive, que Randa a plus tard racontée ainsi :
« Il m’a dit que sa vie ne serait pas normale, qu’il pouvait rester là quinze jours puis disparaître pour longtemps. Mais j’ai toujours rêvé d’épouser un homme fort, quelqu’un qui se bat pour son pays. Je suis fière de lui, qu’il soit sous terre ou au-dessus. »
Quelques mois plus tard, en août 2005, Khader est de nouveau enlevé par les forces d’occupation. Cette fois encore, il est incarcéré en détention administrative, sans procès ni accusation, pendant 15 mois avant d’être libéré. Pendant cette détention, il entame sa deuxième grève de la faim, durant 25 jours, à la prison de Kfar Yona, pour exiger sa sortie de l’isolement — et il arrache la victoire. Lorsqu’il est enfin libéré, Khader et Randa accueillent leur premier enfant, Maali, en 2008. Ils auront ensuite huit autres enfants, dont des triplés. En mars 2008, il est à nouveau arrêté, puis placé en détention administrative pour six mois supplémentaires. En octobre 2010, c’est l’Autorité palestinienne elle-même qui l’arrête et l’emprisonne, en raison de son activité politique, de sa clarté idéologique, et de son refus catégorique de toute normalisation ou collaboration avec l’occupant.
Les grèves de la faim de Khader Adnan pour la liberté
Le 17 décembre 2011, les forces d’occupation font de nouveau irruption à 3h30 du matin dans la maison de la famille Adnan, enlèvent Khader et le placent une nouvelle fois en détention administrative. Cette arrestation survient deux mois après l’échange Wafaa al-Ahrar, arraché par la résistance palestinienne, qui a permis la libération de 1 027 prisonnier·es palestinien·nes en octobre et décembre 2011. Lorsque cet échange est annoncé, le 18 octobre 2011, des centaines de prisonnier·es palestinien·nes sont déjà en grève de la faim illimitée depuis le 27 septembre, pour exiger la fin de l’isolement carcéral, notamment celle d’Ahmad Sa’adat, secrétaire général emprisonné du Front Populaire pour la Libération de la Palestine. La grève est soudainement interrompue avec l’annonce de l’accord d’échange entre la résistance palestinienne et l’occupation sioniste.
Mais cette fois, Cheikh Khader Adnan lance sa propre grève de la faim dès son arrestation — une grève qui durera 66 jours, saisira les rues palestiniennes, mobilisera la solidarité internationale, et inspirera une série de grèves individuelles, aboutissant à la grève collective de la dignité (Karameh) du 17 avril 2012.
Pendant son interrogatoire, alors qu’il refuse toujours de s’alimenter, il est soumis à de violents sévices, documentés par Addameer :
Bien qu’il ait été arrêté à 3h30 du matin, Khader reste enchaîné jusqu’à 8h30, avant d’être transféré à la prison de Megiddo. Dès le premier jour de son arrestation, il commence sa grève de la faim pour protester contre sa détention. Le lendemain matin, il est conduit au centre d’interrogation d’Al-Jalameh. À son arrivée, il subit un examen médical, au cours duquel il informe les médecins pénitentiaires de ses douleurs d’estomac et de ses problèmes de disque vertébral. Au lieu de le soigner, il est immédiatement transféré en salle d’interrogatoire.
Quatre interrogateurs se relaient pour l’insulter et l’humilier, en utilisant notamment un langage obscène visant sa femme, sa sœur, ses enfants et sa mère. Le premier jour, il répond à des questions générales malgré les insultes continues. Mais dès la première session terminée, il refuse de répondre davantage, entamant une grève de la parole en réaction au langage de plus en plus dégradant utilisé par les interrogateurs. Les interrogatoires ont ensuite eu lieu quotidiennement pendant dix jours, à l’exception des lundis.
Le quatrième jour de son interrogatoire, le Service des prisons sionistes (IPS) le condamne à sept jours d’isolement dans sa cellule, en raison de sa grève de la faim. Afin de l’intimider davantage sans passer par un tribunal, l’IPS lui interdit également les visites familiales pendant trois mois, démontrant ainsi son intention préalable de le maintenir en détention une fois son interrogatoire terminé. Khader est placé dans une cellule d’isolement dans une section de la prison partagée avec des prisonniers criminels sinoiste. Une nuit, une escouade de soldats fait une descente dans sa cellule, et lui fait subir une fouille à nu. Pendant sa période d’isolement, Khader continue de subir des interrogatoires quotidiens.
Chaque jour, Khader est soumis à deux sessions d’interrogatoire de trois heures chacune. Pendant ces sessions, ses mains sont attachées dans son dos à une chaise au dossier incliné, lui infligeant des douleurs extrêmes dans le dos. Khader raconte que les interrogateurs le laissaient assis seul dans la pièce pendant plus d’une demi-heure. Il a également subi des mauvais traitements supplémentaires. Au cours de la deuxième semaine d’interrogatoire, un interrogateur lui tire la barbe si violemment qu’il perd des touffes de poils. Ce même interrogateur prend également de la saleté sous sa chaussure et la frotte sur la moustache de Khader, un geste destiné à l’humilier.
Le vendredi 30 décembre 2011, en raison de la détérioration de sa santé due à sa grève de la faim, Khader est transféré à l’hôpital de la prison de Ramleh. Il est mis en isolement dans l’hôpital, où il subit des conditions froides et la présence de cafards dans sa cellule. Depuis le 25 décembre, Khader a refusé tout examen médical, une semaine après avoir cessé de manger et de parler. Le directeur de la prison se rend à son chevet pour tenter de l’intimider davantage, et les soldats ferment la partie supérieure de la porte de sa cellule pour bloquer toute circulation d’air, commentant qu’ils allaient finalement « le briser ».
Au cours des plusieurs semaines qu’a duré sa grève, son visage sur des affiches, ou capturé dans un pochoir de graffiti réalisé par l’artiste palestinien (lui-même emprisonné plus tard) Hafez Omar, a mis en lumière la situation des prisonnier·es palestinien·nes et leur lutte en cours à une échelle mondiale, inspirant des grèves de la faim de solidarité dans le monde entier et des protestations de masse dans les rues de Palestine. Le 15 février, un groupe de dirigeants palestiniens, dont Cheikh Nafez Azzam, Daoud Shihab, Khader Habib et Ahmed Mudallal du Jihad Islamique Palestinien, ont entamé une grève de la faim de solidarité, déclarant qu’il s’agissait « du minimum de ce que nous pouvons faire pour ce symbole légendaire ». Le Premier ministre palestinien, Ismail Haniyeh, avait déclaré depuis Gaza :
« Le peuple palestinien, avec toutes ses composantes et ses factions, ne laissera jamais tomber les héros prisonniers, surtout ceux qui mènent cette bataille de la grève de la faim. »
Des milliers de jeunes Palestiniens ont entouré la prison d’Ofer le 16 février 2012, et le lendemain, plus de 5 000 Palestinien·nes se sont rassemblé·es à Gaza pour scander :
« Nous sommes tous·tes Khader Adnan ! »

Pendant sa grève, il perdit 30 kilos. Sa peau jaunissait, il ne pouvait plus bouger, et sa voix s’éteignait. Il a été transféré d’une prison à l’autre, puis à l’hôpital. Ses avocats ont fait appel de son ordonnance de détention administrative de quatre mois, mais ont été confrontés à des refus répétés, jusqu’à ce que sa détermination triomphe face au geôlier. Le 22 février 2012, après 66 jours de grève de la faim, Khader annonce qu’il sera libéré le 17 avril — journée des prisonnier·es palestinien·nes — sans prolongation de sa détention.
La victoire de Cheikh Khader Adnan a résonné dans toutes les prisons sionistes, déclenchant une vague de grèves de la faim individuelles : Hana’ Shalabi, Bilal Dhiab, Thaer Halahleh, Mohammed al-Qeeq, Jaafar Izzedine, Mahmoud Sarsak, Mohammed Allan, Hassan Safadi, Hisham Hawwash, Maher al-Akhras, et des dizaines d’autres. Le 17 avril 2012, alors que Khader Adnan était libéré des prisons de l’occupation, des milliers de prisonnier·es palestinien·nes ont lancé la grève collective de Karameh (Dignité), avec une série de revendications, y compris la fin de l’isolement des dirigeants du mouvement des prisonnier·es ; cette grève a atteint ses principales revendications en 28 jours. À sa libération, Khader a visité les foyers des prisonniers à Arraba et dans les villages voisins avant de retourner chez lui, soulignant que sa grève individuelle était une action collective, portée par une vision collective pour la libération. Ce fut le début de son engagement dans presque toutes les manifestations ou actions pour un·e prisonnier·e ou un·e martyr·e, partout où il pouvait être présent en Palestine.

Cheikh Khader Adnan est devenu un symbole palestinien, arabe et international de résistance, de courage et de fidélité. Il a montré qu’il était possible de vaincre le geôlier, malgré sa force militaire et le soutien des puissances impérialistes, et a provoqué un renouveau du mouvement des prisonnier·es palestinien·nes, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des prisons. À travers le monde, des milliers de personnes ont découvert la lutte des prisonnier·es palestinien·nes grâce à sa grève de la faim.
Après sa libération, Khader Adnan était une présence constante dans les foyers des prisonnier·es en grève de la faim, dans les tentes de solidarité pour les combattant·es de la liberté emprisonné·es, dans les maisons de deuil des martyr·es, et dans les rues de Palestine, un symbole de victoire et de résistance.

Bien sûr, le régime sioniste n’a pas cessé ses attaques contre Khader, mais il a continué à remporter des victoires contre les geôliers au cours des années suivantes. Il a été brièvement détenu par l’Autorité palestinienne le 27 novembre 2013, alors qu’il tentait de protéger son cousin Farouk Musa des services de sécurité de l’AP impliquées dans la « coordination sécuritaire » avec l’occupation. Le 8 juillet 2014, alors que l’occupation lançait son offensive contre le peuple palestinien à Gaza, il est de nouveau arrêté, pour la dixième fois. Sa sœur a rapporté que les forces d’occupation ont célébré cette arrestation avec joie. Il fut incarcéré pour l’empêcher de jouer son rôle charismatique et efficace parmi les masses palestiniennes pour soutenir le peuple et la résistance à Gaza. Là encore, il fut placé en détention administrative, sans inculpation ni procès, et cette détention fut renouvelée en janvier 2015. Lorsque l’occupation annonça le troisième renouvellement de sa détention administrative le 5 mai 2015, il annonça immédiatement sa grève de la faim, déclarant qu’il ne consommerait que de l’eau et du sel jusqu’à sa libération. Pendant cette grève, Gilad Erdan — plus tard ambassadeur de l’ONU pour le régime sioniste au milieu du génocide à Gaza — promulgua une loi ordonnant aux médecins de forcer l’alimentation des grévistes de la faim palestiniens, qualifiant les grèves de « nouvelle forme d’attaque suicide menaçant l’État d’Israël ».
Encore une fois, après 56 jours de grève de la faim, Cheikh Khader Adnan sortait victorieux de sa confrontation contre le geôlier. Il retourna chez lui à Arraba le 12 juillet 2015, accueilli par des foules qui saluaient sa nouvelle victoire, alors que l’Intifada d’al-Quds se développait à Jérusalem. Quelques jours plus tard, il fut arrêté en route pour Jérusalem, avant d’être libéré à nouveau.

Le 4 janvier 2016, les forces d’occupation arrêtent Khader Adnan près de la ville de Silwad, près de Ramallah, mais il est à nouveau libéré. Toutefois, le 9 octobre 2016, Khader Adnan, accompagné de l’ancien gréviste de la faim libéré Mohammed Allan, de Maher al-Akhras et d’autres, est à nouveau arrêté par l’Autorité palestinienne lorsqu’ils se rendent accueillir le prisonnier libéré Hussein Abu Obeideh dans le village de Sarra, près de Naplouse. Des individus associés au mouvement Fatah attaquent la délégation avec des bâtons et d’autres armes ; les forces de l’AP interviennent en arrêtant les prisonniers libérés et les incarcèrent à la prison de Junaid pendant plusieurs heures. Les habitants du village se rassemblent autour de Khader et de ses camarades pour les protéger, mais eux-mêmes sont menacés d’arrestation. Le Jihad Islamique Palestinien réagit en déclarant que les forces de sécurité de l’AP ont franchi toutes les lignes rouges :
« Cette attaque contre les fils du mouvement prouve leur fidélité à l’occupation sioniste et à la coordination sécuritaire. »
Le 11 décembre 2017, une fois de plus, l’occupation envahit la maison de la famille Adnan en pleine matinée, frappant violemment et interrogeant Khader dans sa maison avant de l’enlever. Il est alors détenu et l’occupation cherche à lui infliger une peine d’au moins cinq ans pour son appartenance au Mouvement du Jihad Islamique Palestinien. Le 2 septembre 2018, après 17 reports de son procès, Khader Adnan lance à nouveau une grève de la faim pour exiger sa libération. Randa, sa femme, écrit à ce moment-là :
« Beaucoup l’ont critiqué pour avoir choisi de faire une grève de la faim contre une affaire judiciaire ; certains ont dit que c’était un souhait de mort. Les organisations des droits humains m’ont dit qu’elles ne me soutiendraient pas si cela se produisait. Mais qui sont-ils pour choisir ou décider contre quoi il proteste ? Qui sont-ils pour décider que ce que fait l’occupation est légal ? Il est en prison depuis presque un an et aucun jugement n’a été rendu. Son principe est que l’occupation est libre de décider quand emprisonner quelqu’un, mais l’occupation n’est pas libre de décider quand libérer un prisonnier politique. L’idée dans cette grève de la faim est qu’il est contre l’essence même de la détention. Toute personne libre, même avec une seule parcelle de dignité, résisterait à la cruauté de l’occupation. »
Et encore une fois, au 58e jour de sa grève de la faim, Khader Adnan a de nouveau vaincu le geôlier. Soudainement, son procès n’était plus reporté, et le 29 octobre, devant le tribunal militaire de Salem, il est condamné à un an de prison à partir de sa date d’arrestation, le 11 décembre 2017, et une amende de 1 000 NIS (270 USD). Le 13 novembre, à peine deux semaines plus tard, Cheikh Khader Adnan retourne chez lui, à Arraba, victorieux, réaffirmant clairement que résister aux « accusations » de l’entité illégitime est aussi soumis à la volonté du mouvement des prisonnier·es palestinien·nes.
Le 5 mai 2021, les forces d’occupation enlèvent à nouveau Khader Adnan, en pleine Intifada de l’Unité / Bataille de Seif al-Quds, après l’avoir arrêté sur un checkpoint près de Naplouse. Il entame immédiatement une grève de la faim, qu’il maintient pendant 25 jours, jusqu’à ce qu’il soit libéré, brisant encore une fois la volonté du geôlier.

Le 5 février 2023, Cheikh Khader Adnan est de nouveau capturé par les forces d’occupation, et lance une grève de la faim, qu’il poursuit, bien que l’occupation l’accuse une nouvelle fois d’appartenir à une « organisation illégale », et d’« inciter » (à la résistance), à cause de ses discours à travers la Cisjordanie sur les prisonnier·es, les martyr·es et la résistance armée grandissante. Encore une fois, il lance sa grève de la faim. Randa Adnan lance un appel urgent au monde, alors que la grève de son mari se poursuit :
« Mon message aux peuples libres du monde et aux Nations Unies est d’agir et de faire pression sur l’occupation pour qu’elle respecte les droits humains, qu’elle arrête les traitements inhumains infligés aux prisonnier·es palestinien·nes, qu’elle nous aide mes enfants et moi à rendre visite à Khader, qu’elle sauve la vie de mon mari et de leur père de la mort lente qu’il vit, et qu’elle le libère avant qu’il ne soit trop tard. Je remercie toutes celles et ceux qui ont soutenu mon mari depuis le début de sa grève de la faim ; mais je ne pardonnerai jamais à ceux qui auraient pu faire quelque chose pour lever cette injustice contre mon mari, mais ne l’ont pas fait. Mon mari, Khader Adnan, représente le message d’une nation et mène ce combat pour son peuple. Il n’aime ni la faim, ni la mort, mais refuse une vie d’humiliation et se bat pour la liberté et la dignité. »
Le martyr de Cheikh Khader Adnan, symbole de dignité, de liberté et de résistance, n’est rien d’autre qu’un assassinat sioniste, mené avec préméditation. Lorsque Khader s’effondre le 2 mai 2023, entouré de caméras de surveillance, dans la prétendue « clinique » de la prison de Ramleh, les gardes de l’occupation et le personnel ont attendu plus de 30 minutes pour entrer dans la chambre, attendant sa mort. Il était évident, durant les mois de sa grève de 2023, que l’occupation était déterminée à éliminer ce symbole de la résistance des prisonnier·es et du sacrifice palestinien, de son engagement et de son amour pour son peuple et sa terre.
« Dans chaque grève, Khader ne se contentait pas de défier ses geôliers, mais il prononçait le nom de milliers de prisonnier·es réduits au silence derrière les murs, et portait leur voix au monde à travers son corps maigre et son estomac vide… Bien que deux ans se soient écoulés depuis son martyr, le nom de Khader Adnan reste vivant dans la mémoire des Palestinien·nes, surtout dans les prisons. Khader n’est pas mort, mais sa résistance s’est diffusée dans les corps de milliers de prisonnier·es, et sa grève est devenue une école qui inspire la résistance. »

Bien que Khader Adnan soit sans doute le plus célèbre défenseur et pratiquant de ce qui a été qualifié de « grève de la faim individuelle », il est essentiel de souligner ici que ses actions n’étaient pas individualistes, aléatoires ni déconnectées. Au contraire, elles faisaient partie d’un effort profondément collectif visant à revitaliser et faire progresser le mouvement des prisonnier·es palestinien·nes, et à placer les prisonnier·es palestinien·nes au centre du mouvement de libération nationale palestinien.
Cheikh Khader Adnan a développé son engagement au sein de son mouvement et au-delà, et croyait profondément en l’unité nationale, qu’il a mise en pratique en soutenant les martyr·es et les prisonnier·es. Il était un homme avec une vision collective, consacrant ses actions au développement stratégique du mouvement des prisonnier·es et à son avancée vers une nouvelle étape de la lutte, développement qui s’est fait en parallèle avec le renouveau de la résistance armée dans les camps de Cisjordanie — aujourd’hui sous attaque brutale — et bien sûr, au cœur de la résistance de la Palestine à Gaza.
« Khader était un homme de communauté, il savait comment mobiliser », a déclaré Randa, sa femme, dans une interview. « Sa stratégie était la mobilisation collective. Il veillait à ce que lorsque nous allions soutenir les détenu·es ou les grévistes de la faim, ou lorsque nous participions aux veillées, nous y allions tous, toute la famille. C’était un acte collectif. »
Inscrire ses actions comme de simples grèves « individuelles » revient à une incompréhension du fait que ses actions ont toujours été soutenues fermement par ses camarades. Le Mouvement du Jihad Islamique Palestinien n’a pas lancé des dizaines de missiles sur l’entité occupante en réponse à son assassinat simplement parce qu’il était une figure proéminente, mais parce qu’il était un véritable militant avec une vision collective, et organisé au cœur de la résistance sous toutes ses formes.
L’histoire du mouvement des prisonniers au cours des deux dernières décennies est profondément liée à celle de Cheikh Khader Adnan. Tout comme son refus total de confesser ou de collaborer avec les interrogateurs trouve ses racines dans la longue histoire du rejet des confessions forcées et de l’engagement dans la « stratégie de confrontation derrière les barreaux ». Le chemin du Tunnel de la Liberté, lorsque six prisonniers palestiniens de la prison de Gilboa — dont cinq membres du Jihad islamique Palestinien de Jénine — s’évadent, passe également par les années de lutte dans les prisons illustrées par ses grèves de la faim répétées, visant non seulement sa libération, mais aussi pour ramener le mouvement des prisonnier·es au centre de la cause.
De manière similaire, il est évident qu’aux côtés de la Bataille de Seif al-Quds / l’Intifada de l’Unité, le Tunnel de la Liberté — et bien sûr, l’échange de prisonnier·es Wafa al-Ahrar réalisé par le Hamas et les Brigades al-Qassam en 2011 — fait partie des prémices immédiates du Déluge d’Al-Aqsa. Le Tunnel de la Liberté a exposé la nature illusoire de la prétendue supériorité technologique et de renseignement de l’occupation, et a inspiré un espoir collectif et un optimisme en Palestine et dans le monde entier quant à l’avenir de la cause palestinienne, tout en lançant un appel urgent pour la libération des prisonnier·es des geôles du régime sioniste.
La clarté politique de Khader Adnan
En 2015, lors de sa libération, Cheikh Khader Adnan a déclaré :
« Le mouvement des prisonnier·es et les grèves de la faim, en particulier, sont un symbole du principe et de la demande de justice pour la Palestine. Cela prouve qu’il est bien sûr à la fois possible et nécessaire de briser l’occupation sioniste… Mais nous avons besoin de l’unité du mouvement national palestinien. Nous devons convaincre les instances officielles, la direction et le peuple de la nécessité de la résistance. Nous devons fusionner toutes nos énergies, de Jérusalem, Gaza, en Cisjordanie et dans la diaspora. Nous avons besoin de l’unification de toutes ces énergies avec les peuples libres du monde pour défendre les droits des prisonnier·es et de tous les Palestinien·nes. »

Depuis ses premières déclarations publiques visibles, où il défiait l’ancien Premier ministre français Lionel Jospin pour son attaque contre la Résistance libanaise, il a exprimé une vision claire et cohérente de la libération palestinienne, ainsi qu’une vision inclusive de la lutte, appelant à une rupture complète avec le chemin des accords d’Oslo — celui de la « coordination sécuritaire », de la collaboration avec l’occupant, et du régime compradore.
En effet, son rôle dans le mouvement étudiant continue d’inspirer des générations d’étudiant·es, qui non seulement ont protesté sur les campus à travers la Palestine et le monde lors de ses grèves de la faim, mais qui continuent à se souvenir de son propre héritage de lutte étudiante. Le Conseil étudiant de Birzeit 2023-24, dont les dirigeants ont eux-mêmes été soumis à l’emprisonnement et à la détention administrative, s’est nommé la promotion du martyr Khader Adnan, avec son image sur les documents et affiches du mouvement étudiant.
« Ma position sera toujours aux côtés des prisonnier·es, que ce soit à côté d’eux et d’elles, derrière eux et elles ou devant eux et elles. De la bande de Gaza à la Cisjordanie, des territoires de ’48 à l’exil, chaque Palestinien·ne est obligé·e de rester uni·e. Nous sommes tous·tes les enfants de la même cause, et un seul peuple vivant sous la même occupation. J’ai vu tellement de soutien de notre famille en Palestine de 1948, des médecins et infirmier·es palestinien·nes, des Palestinien·nes de Haïfa, des élèves de Nazareth qui ont rédigé un devoir sur moi… Je n’oublierai jamais leur amour. »
En 2017, Khader Adnan était présent lors des funérailles de Basil al-Araj, le combattant, intellectuel et militant palestinien qui a choisi le chemin de la résistance et avait été emprisonné par l’Autorité Palestinienne, faisant une grève de la faim pour sa liberté et celle de ses camarades, avant de devenir martyr dans une bataille contre les forces d’occupation. Lui et le père de Basil al-Araj ont été attaqués par les forces de l’Autorité palestinienne alors qu’ils protestaient à Ramallah contre la tentative de l’AP de juger le martyr et ses camarades. À cette occasion, il a adressé un message à l’AP :
« Si un jour je deviens martyr, ne vous approchez pas de mon corps, n’entrez pas dans nos maisons, ne vous joignez pas à notre deuil, nos condoléances, ni à nos célébrations, car vous avez plus de haine et d’audace envers nous que l’occupation. »
« En effet, les forces de l’AP ont attaqué une marche de colère condamnant l’assassinat de Cheikh Khader, moins de 24 heures après son martyr. »
Le mouvement étudiant palestinien a également lié les deux martyrs, en déployant une banderole à leur effigie, pour honorer Nizar Banat, Basil al-Araj et Khader Adnan, et leur héritage de lutte pour corriger la boussole de la cause palestinienne, vers le retour et la libération.

En février 2022, lorsque Khader s’est rendu près des familles de trois martyrs assassinés par l’occupation à Naplouse, il a lui-même été victime d’une tentative d’assassinat par des individus liés à l’Autorité palestinienne, rappelant l’attaque de 2016. Bien qu’il n’ait pas été atteint, les frères des martyrs ont été blessés. Il a déclaré que des « mercenaires » leur avaient tiré dessus, et a rappelé l’assassinat de Nizar Banat, en disant :
« Celui qui a tué Nizar Banat a tenté de me tuer. »
Avant de rappeler ses premières arrestations par l’Autorité palestinienne, notant que lorsqu’il avait été emprisonné à la prison de Jéricho en tant qu’étudiant, il avait été jeté, giflé et détenu avec un sac sur la tête :
« J’ai été arrêté dans les prisons de l’occupation et j’ai fait une grève de la faim comme j’ai fait à Areeha… Les années ont passé, les arrestations [de l’AP] se sont succédées, et elles sont devenues des agressions et des tentatives [d’assassinat]. L’AP a avancé, évolué, diabolisé et incité… Ils ont tué Nizar. Aujourd’hui, ils veulent nous tuer en distribuant de fausses accusations et en incitant contre les foyers des martyrs, des prisonniers, des blessés, en usant de la surveillance à distance. »
Ces agressions physiques ont été accompagnées de tentatives d’atteindre à sa réputation et de miner son autorité morale incontestée parmi les familles des prisonnier·es et des martyr·es. Cela est particulièrement important à rappeler aujourd’hui, lorsque peu de gens admettraient avoir attaqué et répandu des rumeurs sur le martyr combattant, même si beaucoup des mêmes forces sont activement engagées dans une campagne de guerre psychologique dirigée par les sionistes et les impérialistes contre la résistance à Gaza — et aussi au Liban, au Yémen et dans toute la région.
Aujourd’hui, le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, se joint aux États-Unis, à la France, à l’Allemagne et au régime sioniste pour demander le désarmement de la résistance palestinienne à Gaza, alors qu’elle fait face à un génocide sioniste-impérialiste. L’Autorité palestinienne continue d’attaquer et d’arrêter les combattants de la résistance, saisissant et démantelant leurs armes en Cisjordanie, nettoyant les camps de réfugié·es pour les invasions de l’occupation qui ont déjà déplacé des dizaines de milliers de Palestinien·nes. Depuis le 7 octobre 2023, l’Autorité palestinienne a enlevé la vie de 21 martyrs et arrêté des centaines de personnes pour leur participation à la résistance ou même simplement pour avoir parlé et manifesté pour Gaza. La campagne de guerre psychologique visant à retourner les gens contre la résistance à Gaza et partout en Palestine n’est pas seulement de la collaboration, c’est une complicité active dans le génocide.
“Malgré le prix potentiellement élevé de la mort d’Adnan, pour “Israël”, ces Palestinien·nes représentent un véritable danger. Ils et elles sont souvent pauvres, humbles, ancré·es dans la communauté, et sont des figures rassembleuses, qui défient un discours politique qui est en place depuis la signature des Accords d’Oslo ; un processus qui a divisé les Palestinien·nes en classes, transformant des frères et soeurs en ennemi·es, et permettant à “Israël” de maintenir son occupation militaire et son apartheid, sans entrave.”
En effet, Khader Adnan parlait souvent avec une grande humilité, notamment lors de sa libération en 2012 :
“Pendant mes jours à l’hôpital [Meir Ziv] à Safad, en Palestine occupée avant la partition, j’ai été rappelé à la sainteté et à la gloire de cette terre. Être proche des pays résistants comme le Liban et la Syrie m’a donné encore plus de motivation pour défier les autorités pénitentiaires sionistes, dont je refuse de reconnaitre la légitimité. Je n’ai guère apporté quelque chose de valeur à la cause palestinienne. Je travaille dans une boulangerie et je vends du zaatar, et je continuerai de le faire pour rappeler à chaque Palestinien·ne que leurs racines sont profondément ancrées dans cette terre, parmi les oliviers et le zaatar.”
Cependant, en même temps, il n’avait que des descriptions magnifiques pour la résistance, les martyr·es et le mouvement des prisonniers, et a défendu une vision claire et sans compromis de la libération :
“Tel Aviv et les autres ‘villes coloniales’ établies sur notre terre occupée ne seront jamais un lieu sur pour l’ennemi ; les fedayin expulseront l’occupant, et nous croyons en la promesse de victoire et en le pouvoir de Dieu.”
Il était le porte-parole et la voix d’une résistance palestinienne enracinée dans les classes populaires, dédiée à la cause des masses palestiniennes et à leur avancée, et rejetant tous ceux qui cherchaient un avantage par la collaboration avec l’occupant.
Lors de son martyr, des combattants du Mouvement du Jihad islamique Palestinien à Gaza, ont tiré des dizaines de roquettes vers l’intérieur occupé de la Palestine, exprimant leur indignation et leur vengeance pour l’assassinat de ce grand leader palestinien. Le régime sioniste a poursuivi sa campagne d’assassinats avec une série d’attaques contre des leaders du mouvement — Tareq Izzedine, lui-même un prisonnier libéré dans l’échange de prisonniers Wafa al-Ahrar, et le frère de Jaafar Izzedine, l’un des grévistes de la faim arrêtés pour avoir participé aux actions pour exiger la libération d’Adnan en 2012 ; aux côtés de Jihad Ghannam, Khaled al-Bahtini, Iyad al-Hassani, Ali Ghali et Ahmed Abu Daqqa, tous des résistants distingués ayant joué un rôle clé dans le développement de la résistance à Gaza ainsi qu’en Cisjordanie. Cela a donné lieu à la Bataille de la Vengeance des Libres, dans laquelle la résistance à Gaza a affronté l’occupant et ses armes fabriquées par les États-Unis et l’Europe pendant plus d’une semaine.
Le martyr Tareq Izzedine, a fait sa dernière déclaration avant son assassinat sur le martyr de Cheikh Khader Adnan, lui-même assassiné par le refus délibéré de soins médicaux dans les prisons sionistes. Ses mots résonnent encore aujourd’hui (vidéo du Resistance News Network) :
“Chaque fois qu’un leader s’élève, dix viendront le remplacer. Lorsqu’un martyr s’élève, cent martyrs surgiront pour le remplacer. La marche continue, et elle ne s’arrêtera pas avant la défaite de l’occupation.”
En 2022, Khader Adnan affirmait, dans un message qui reste aussi pertinent qu’urgent, aujourd’hui, face au génocide sioniste-impérialiste en cours :
“Notre peuple palestinien embrasse la résistance sur tous les fronts. L’occupation ne comprend que le langage de la force et de la résistance. Ce que l’occupation craint le plus, c’est l’esprit de résistance de notre peuple qui rejette l’occupation, et le courage dont notre peuple fait preuve dans la résistance. Nous appelons notre peuple à rejoindre les rangs de la résistance pour affronter l’occupant.”
Khader Adnan et l’Internationalisme
Cheikh Khader Adnan considérait l’aspect international de la cause palestinienne, et particulièrement le soutien aux prisonnier·es, comme étant d’une importance capitale, et il n’a jamais hésité à adresser sa solidarité avec les luttes internationales. Il a exprimé une solidarité constante avec ses camarades prisonnier·es qui luttaient contre l’injustice, comme il l’a fait dans son message aux prisonniers de Californie en grève de la faim en 2012, et dans son message aux républicain·es irlandais·es qui se sont tenu·es à ses côtés pendant sa propre grève de la faim.
En soutien aux prisonniers californiens en grève de la faim dans les prisons américaines, il a déclaré :
“La politique d’isolement est une arme bon marché dans les mains de ceux qui détiennent le pouvoir. La politique d’isolement est utilisée contre les citoyen·nes américain·es qui sont victimes de l’ordre/système politique, économique et social qui prospère grâce à la cupidité, à la discrimination et à l’exploitation. Cette politique vise les Afro-Américain·nes mais aussi des résistant·es palestinien·nes comme Sameeh Hamoudeh et Sami Al-Arian. La politique d’isolement expose le visage hideux de ces fausses démocraties coupables d’occupation, de tyrannie et de répression sociale… Je déclare ma solidarité totale avec mes frères opprimés dans les prisons américaines et je demande au peuple et au gouvernement américains de mettre fin à la politique d’isolement des détenus et des prisonniers, et de se conformer à la loi sur les droits de l’homme qui interdit l’isolement continu en raison de ses effets destructeurs sur la santé mentale et physique des détenus.”
“La grève de la faim collective est un signal à tous les peuples opprimés et vulnérables partout, pas seulement aux Palestinien·nes. C’est un message à tous·tes ceux et celles qui souffrent de l’injustice, sous le poids de l’oppression. Cette méthode sera couronnée de succès, si Dieu le veut, et elle permettra d’obtenir les droits des prisonnier·es. Je demande à Dieu de diffuser la conscience des hommes libres dans le monde entier. Je les remercie tous, en particulier le peuple Irlandais, car ils et elles se sont tenu·es à mes côtés pendant ma grève de la faim. Je leur demande de se solidariser avec tous·tes les prisonnier·es palestinien·nes en grève de la faim, passés, présents et futurs, avec notre peuple torturé et opprimé qui vit sous l’injustice de l’occupation jour et nuit.”
Il a exhorté tous ceux qui l’avaient soutenu à soutenir ses camarades grévistes de la faim :
“Que tous les libres et révolutionnaires se tiennent main dans la main contre l’oppression de l’occupation, et qu’ils et elles descendent dans les rues – devant les prisons de l’occupation, devant ses ambassades et toutes ses autres institutions qui la soutiennent à travers le monde.”
Comme dans sa déclaration de solidarité avec les grévistes de la faim en Californie, où il avait mis en avant les prisonniers politiques palestiniens incarcérés dans les prisons américaines, il fit de même en ce qui concerne la France. Lorsqu’il participa à un événement en l’honneur des prisonnier·es politiques palestinien·nes à Arraba le 28 février 2013, en plantant des semis portant les noms des prisonniers, il en planta un en l’honneur de Georges Ibrahim Abdallah, le combattant arabe libanais, militant de la cause palestinienne incarcéré en France depuis 40 ans, en notant que ce dernier avait refusé ses repas pendant cinq jours en solidarité avec les prisonnier·es palestinien·nes.
Après son martyr, à Toulouse, en France, le Collectif Palestine Vaincra a répliqué cet événement précédent , en honorant Khader Adnan, avec des militant·es palestinien·nes, arabes et internationalistes plantant un jasmin dans un jardin communautaire, accompagné de portraits d’Adnan ainsi que du drapeau et de la carte de la Palestine. Les participant·es ont prononcé un discours en arabe soulignant son engagement et son sacrifice pour son peuple et sa terre.
Ses grèves de la faim ont suscité une solidarité mondiale. Elles ont exposé pour la première fois à de nombreuses personnes non seulement la souffrance des prisonnier·es palestinien·nes, mais aussi leur résistance et leur ténacité. Notre propre développement en tant que réseau Samidoun était, en partie, lié au développement des luttes menées par Cheikh Khader Adnan et à leurs répercussions internationales.
“Cette bataille a mis en évidence la faillite du discours de “modération” qu’”Israël” et les États-Unis ont imposé à la direction officielle palestinienne. Cette posture modérée prétend que si nous, Palestinien·nes, voulons obtenir un soutien international, nous devons adopter une attitude modérée. En pratique, cela signifie accepter volontairement les contrôles oppressifs imposés par le terrorisme mondialisé de l’État. La “modération” ici signifie abandonner le droit de résister à l’occupation.
Cependant, ce que nous venons de voir, c’est que le monde soutient quand les Palestinien·nes elleux-mêmes se battent et tiennent bon, quelle que soit leur affiliation politique. La capacité d’affecter et de mobiliser l’opinion publique internationale et d’obtenir une solidarité large et efficace n’a pas été le résultat d’une stratégie de relations publiques mais d’une véritable lutte sur le terrain contre la machine coloniale oppressante.”
Toutes les puissances impérialistes — les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France, l’Allemagne, le Canada et les États membres de l’Union européenne — qui maintiennent le projet sioniste comme base de l’impérialisme occidental dans la région sont pleinement complices de l’assassinat de Khader Adnan, tout comme elles le sont dans la politique de “mort lente” par torture, famine, agressions physiques et sexuelles, et la privation des soins médicaux à plus de 66 prisonniers palestiniens martyrs depuis le 7 octobre 2023 dans les prisons sionistes. Il y a au moins 303 martyrs du mouvement des prisonniers depuis 1967 (les données ne sont pas compilées pour la période de 1948 à 1967). L’occupation continue de maintenir le corps de Khader Adnan en captivité, tout comme elle maintient ceux de centaines de Palestinien·nes, dont au moins 75 prisonniers martyrs — dont 64 depuis assassinés depuis le lancement du Déluge d’Al-Aqsa.
Le martyr de Sheikh Khader Adnan a été pleuré dans le monde entier. En Irlande, le Bobby Sands Trust publiait une déclaration en sa mémoire, adressant ses condoléances à la femme et à la famille d’Adnan. Lors de leur protestation contre le couronnement du roi Charles, l’Action Anti-Impérialiste a honoré à la fois Khader Adnan et Bobby Sands, le martyr du mouvement des prisonnier·es républicain·es irlandais·es qui est mort dans les prisons britanniques le 5 mai 1981 d’une grève de la faim.
À Téhéran, en Iran, quelques jours après que les gens se soient rassemblés sur la place Filistin pour pleurer Adnan, une grande bannière murale a été accrochée en son honneur, célébrant son engagement pour la libération de la Palestine.
En Allemagne, des fresques murales, des affiches et des graffitis rendant hommage à Adnan ont recouvert les murs des rues de Berlin et de Düsseldorf, suivis presque immédiatement par le déploiement de forces de police de Berlin pour retirer ces affiches, ce qui montre à quel point même son image continuait d’effrayer les puissances impérialistes.


À Paris, d’autres posters et affiches ont également recouvert les murs de la capitale, pour rendre hommage au leader et militant Khader Adnan, reprenant ses mots : “Si vous vivez, vivez libres, ou mourrez debout, comme des arbres”

Samidoun déclarait, au moment de son martyr :
“Le cheikh Khader Adnan était un défenseur infatigable de la résistance, dédié corps et âme au peuple palestinien. Il a refusé d’abandonner la résistance et a continué sa grève de la faim jusqu’à son dernier souffle, fidèle à son approche de l’existence : la liberté ou le martyr. Son martyr doit devenir un cri de rage et un engagement à continuer la lutte en prennant exemple sur ses grands sacrifices et son dévouement pour le peuple palestinien et la libération totale de la terre de Palestine, de la Mer au Jourdain.”
Bien sûr, il n’était pas seulement le leader populaire, le moudjahid combattant, le prisonnier résistant.
Il était aussi le mari bien-aimé, le père et le membre de la famille, l’homme à propos duquel sa femme, Randa, disait :
“Khader s’assoit par terre et joue avec ses enfants, on nettoie les toilettes main dans la main, il passe le balai, il me sèche les cheveux et enlève mes points noirs. Il est mon âme sœur. Bien que je porte le poids de son absence et la peur de le perdre, je le soutiens dans sa lutte et son parcours. En tant que famille, nous croyons en l’amour pour notre terre. Nous croyons au sacrifice pour notre terre. Notre patrie a besoin de gens comme Khader.“
Alors que le génocide continue depuis plus de 18 mois, la campagne d’assassinat continue reste une arme principale de l’agression sioniste-impérialiste, ciblant les leaders du peuple palestinien et arabe. De Sayyed Hassan Nasrallah à Yahya Sinwar, d’Ibrahim Aqil à Fouad Shukr, d’Abbas al-Musawi à Ismail Haniyeh, de Saleh al-Arouri à Fathi Shiqaqi, d’Abu Ali Mustafa à Abdel-Aziz Rantisi, de Sheikh Ahmed Yassin à Imad Mughniyyeh, de Yahya Ayyash à Abu Jihad, de Kamal ‘Udwan à Mohammed al-Najjar, de Basil al-Kubaisi à Kamal Nasser, de Wadie Haddad à Ghassan Kanafani, de Mohammed Boudia à Basil al-Araj, de Tariq Izzedine à Samir Kuntar, au milieu des martyrs du mouvement des prisonnier·es, y compris ses camarades de grève de la faim Abdel Qader Abu Al-Fahm en 1970, Rasem Halawa en 1980, Ali al-Jaafari en 1980, Anis Dawlah en 1980, Ishaq Maragha en 1983, Mahmoud Freitekh en 1984, et Hussain Obaidat en 1992 ; au milieu des près de 700 corps des martyr·es emprisonné·es par l’occupant, le cheikh Khader Adnan et tous·tes ses frères, sœurs et camarades dans la lutte continuent de montrer la voie vers la libération.
“Mon cher peuple palestinien… ne désespérez pas. Peu importe ce que les occupants font, et peu importe jusqu’où ils vont dans leur injustice et leur agression, notre victoire est proche“
Affirmait il. En ce temps de génocide sioniste-impérialiste, avec la famine de masse utilisée comme un outil du génocide en plus de 17 ans de siège sur Gaza, au moment des proclamations ouvertement génocidaires de Smotrich, Ben-Gvir, Netanyahu et de leur cohorte, alors que la Résistance fait preuve d’un courage et d’un engagement sans pareil, ses paroles résonnent toujours aussi vraies aujourd’hui.
En nous souvenant du cheikh Khader Adnan, deux ans après son martyr, la position de notre mouvement international reste le même : construire le berceau populaire international de la résistance et intensifier la lutte pour imposer un coût à l’occupant. Aujourd’hui, le peuple, les forces armées et le mouvement AnsarAllah du Yémen sont un exemple de ce que le pouvoir d’une résistance globale peut signifier, et l’exemple même du mouvement de boycott. Khader Adnan doit vivre en chacun·e de nous et dans nos actions, en l’honneur de son sacrifice, de son engagement et de sa volonté de mettre son corps et sa vie en jeu non seulement pour sa propre liberté, mais pour la libération de toute la Palestine, de la Mer au Jourdain.
Nous appelons tous·tes les soutiens du peuple palestinien et de sa résistance à s’organiser et à agir pour mettre fin au génocide, briser le siège sur Gaza, libérer les prisonnier·es palestinien·nes et libérer la Palestine du fleuve à la mer, notamment en participant à la grève mondiale du 15 mai pour marquer la 77eme commémoration du début de la Nakba toujours en cours.
« Je me prive de nourriture pour que vous restiez. Je meurs pour que vous viviez. Restez fidèle à la révolution. » – Khader Adnan
Ci-dessous, nous republions le testament du prisonnier martyr, le cheikh Khader Adnan. Il a écrit son testament le 2 avril 2023, un mois avant son martyr, près de deux mois après le début de sa grève de la faim. Khader Adnan a été martyrié dans les prisons de l’occupation sioniste le 2 mai 2023 après 86 jours de grève de la faim et dans un contexte où l’entité sioniste était clairement déterminée à mettre fin à sa vie. Khader Adnan demeure un symbole éternel de fermeté, de liberté, de dignité et de résistance :
Au nom de Dieu, le tout miséricordieux, le très miséricordieux
Le Tout-Puissant a dit : « Ceux qui disent : ‘Notre Seigneur est Dieu’ et qui restent fermes, ceux-là ne craignent rien et ne s’affligent pas, et jamais Dieu n’accordera aux infidèles un moyen de triompher des pieux. »
Louange à Dieu, Seigneur des mondes, pour m’avoir donné la capacité de frapper pour la liberté. Louange à Dieu pour ses innombrables bénédictions, et que les prières et la paix soient sur le maître de la création, le bien-aimé en vérité, notre prophète Muhammad, que Dieu le bénisse, lui et sa famille, et lui accorde la paix.
Je vous envoie ces mots, alors que ma chair a fondu, que mes os ont été rongés et que mes forces se sont affaiblies à cause de mon emprisonnement dans la ville palestinienne bien-aimée et authentique d’Al-Ramla. Voici ce que je souhaite à ma famille, à mes enfants, à ma femme et à mon peuple.
Ma femme, je te conseille, ainsi qu’à mes enfants, de craindre le Très-Haut, de t’accrocher à Sa corde solide, de te contenter de Ses bienfaits à l’exclusion de ceux des autres, de dire la vérité en tout temps et en tout lieu, de maintenir les liens de parenté, de prier et d’acquitter la l’aumône, de préserver la sainteté de Dieu et Son droit sur notre situation, notre argent, nos déplacements, notre résidence et notre savoir. Les meilleures maisons en Palestine sont celles des martyrs, des prisonniers, des blessés et des justes.
Je te confie nos oncles, tantes, parents et voisins, tous ceux qui ont un droit sur nous. Je te confie de ne laisser à personne une dette de ma part, morale ou matérielle, car ton bien-aimé a le plus besoin de Sa miséricorde. Si mon sort est le martyre, ne permettez pas à l’occupant de disséquer mon corps, enterrez-moi près de mon père et écrivez sur ma tombe « Ici repose le pauvre serviteur de Dieu, Khader Adnan. Priez pour lui, ses parents et les musulmans du monde entier ». Faites-en une tombe simple, et demandez à Dieu le pardon, la miséricorde, le raffermissement et la largeur [métaphysique] de la tombe, et de faire de nos tombes un jardin du paradis, et non une des fosses des profondeurs de l’enfer, et qu’Il accepte toutes nos actions comme réalisées uniquement pour Sa noble face.
Mère d’Abd al-Rahman [son épouse] et mes enfants, Ma’ali, Bisan, Abd al-Rahman, Muhammad, Ali, Hamza, Maryam, Omar et Zainab. Pardonnez-moi, ainsi qu’à mes frères Abu Adnan, Abu Anas, Umm Nour et à tous les oncles, parents, amis et voisins, tout manquement de ma part à votre encontre au moment où je quitte cette vie temporaire, mais assurez-vous que je n’ai pas été distrait de vous, sauf par la permission de Dieu pour le devoir.
Ô notre fier peuple, je vous envoie ce commandement de salutations et d’amour, et je suis plein de confiance en Sa miséricorde, Sa victoire et Son raffermissement.
Mes salutations à nos commandants, aux familles des martyrs et des prisonniers, et mes salutations à eux et à tous les révolutionnaires.
Ton mari aimant, mère de Abd al-Rahman ; votre père aimant, mes enfants ; votre frère aimant, mes frères ; votre fils aimant, notre peuple.
Je prie Dieu de m’accepter en tant que martyr fidèle pour Sa noble face.
Votre bien-aimé, Khader Adnan
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